Après les States, c’est au tour de la Hongrie d’Orbán de diaboliser les Antifa. Et d’autres vont suivre. Antifa ? Vous avez dit Antifa ?
Aux États-Unis, le 22 septembre, la Maison Blanche a publié un décret intitulé « Désignation d’Antifa comme organisation terroriste nationale » (whitehouse.gov, presidency.ucsb.edu) enjoignant les agences fédérales « d’utiliser tous les pouvoirs applicables pour enquêter, perturber et démanteler toutes les opérations illégales menées par Antifa ou toute personne prétendant agir au nom d’Antifa, ou pour lesquelles Antifa ou toute personne prétendant agir au nom d’Antifa a fourni un soutien matériel. »
Et Donald Trump vient d’ordonner au ministre de la défense, Pete Hegseth, « de déployer toutes les troupes nécessaires pour protéger Portland ravagé par la guerre, et nos installations de [la police de l’immigration] assiégées par des antifa et d’autres terroristes intérieurs […] J’autorise aussi l’usage de la force maximale si nécessaire ».
En Hongrie, le 26 septembre, un décret gouvernemental (magyarkozlony.hu) a ajouté les « Groupements Antifa » à la « liste nationale antiterroriste » et aux Pays-Bas, le 18 septembre, une motion parlementaire non contraignante (euronews.com), adoptée à 76 voix sur 150, appelle le gouvernement à « qualifier Antifa d’organisation terroriste ». Mais que fait Bruno Retailleau !?
Antifascisme non grata
Bref, où que ce soit, le terme d’Antifa n’est jamais clairement défini. Et pour cause, il s’agit d’une idéologie. Antifa, pour antifascisme. Oui, que les choses soient claires, je suis antifasciste, car je n’aimerais tout simplement pas que le fascisme se réinstalle tranquillement, officiellement, institutionnellement… vu comment ça s’est fini la dernière fois. Suis-je un terroriste ? Suis-je un hors-la-loi ? À lire ces décrets, le doute m’assaille.
Imagine-t-on en outre que des États comme les Zunis ou la Hongrie ne possédaient pas déjà un cadre légal pour punir des agissements violents voire terroristes, quelle qu’en soit la motivation ? Cela signifierait qu’un terroriste tuant 1000 personnes au nom de l’Amour (à ma connaissance non encore reconnu comme idéologie terro) ne risquerait pas grand-chose ? Hmmm… j’en doute.
Terrorisme par association : l’art d’accoler des mots qui piquent
Mais associer systématiquement « gauche », « antifa » et « terrorisme » est sacrément efficace… autrement. En psycho, ce qu’on appelle un truc du genre « Conditionnement par biais d’association » (promis j’arrête avec les mots savants) est bien connu depuis longtemps : quand deux mots/choses apparaissent souvent ensemble, notre cerveau les relie inconsciemment comme si elles allaient de pair, même sans preuve rationnelle. Les pubs vous décrivent-elles scientifiquement les avantages des produits vantés ? Non : elles exploitent ce biais en accolant le produit à une image positive. Et ça marche plutôt bien.
Ainsi, marteler « écologie = punition » finit par ternir globalement l’image de l’écologie. De même, lier « Antifa » et « terrorisme » ne donne pas très envie. Et, question bête, si les Antifa sont les méchants… les Fa ne seraient-ils pas finalement les gentils ?
Statistiquement vôtre
Ah… au fait, un détail… Le CSIS (Center for Strategic and International Studies) compile des données sur les attaques et complots terroristes aux États‑Unis (725 événements entre 1994 et le 30 avril 2024).
Et voici le résultat (csis.org) : entre 2016 et 2025, le terrorisme d’extrême droite a tué 112 fois lors de 152 attaques, contre 13 fois lors de 35 attaques pour l’extrême gauche.
Graphique : en rouge, les attaques/complots terroristes d’extrême droite, et en bleu, ceux d’extrême gauche…
Il y avait effectivement urgence à punir les Antifa… puisqu’on vous le dit !
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